Présentation


Je suis né il y a plus de 80 ans, dans une ferme des environs de Nantes, dans une famille très nombreuse où je suis le 7ème de douze enfants. Dix sont encore vivants, de 71 à 91 ans et nous aimons toujours nous retrouver, même si ça devient de plus en plus compliqué pour plusieurs de se déplacer.

Je suis prêtre depuis 1956: j'ai été ordonné juste à la veille de mon rappel en Algérie: première expérience inoubliable.

J'ai vécu vingt ans dans des ministères au service des mouvements en Monde Ouvrier: ACE, JOC, ACO, Mission Ouvrière et je reste toujours fidèle à cette intuition de l'Action Catholique qui a été déterminante pour l'Église.

Je n'en ai pas moins aimé mes ministères en paroisse, à Basse-Indre, Saint-Nazaire et Nantes, toujours en milieu populaire, avec le souci d'aider les communautés chrétiennes à s'ouvrir au monde tout en s'enracinant dans la foi au Christ, par l'accueil de la Parole et des sacrements

La dynamique du Concile Vatican II a 'bousté' toute ma génération, mais nous n'en avons pas moins été souvent déçus, sinon scandalisés par l'autoritarisme et le moralisme de cette Église que nous aimons pourtant comme une mère.

Aujourd'hui en retraite, je cultive les liens, j'entretiens les amitiés, j'essaie de conjuguer l'indignation et la gratitude et je surveille le baromètre de la joie et de la paix. Ce blog est un moyen parmi d'autres de ne pas m'isoler et de partager avec des amis quelques 'feuilles d'automne'...

Autre adresse: Paul Feuilles d'automne over-blog.com
















Perles, sel, graines et grains de sable 2002-2003

2002 – Perle, sel, graines et grains de sable


1-
Un jeune homme entre en rêve dans un grand magasin
derrière le comptoir se tient un ange qui fait office de vendeur:
    "Que vendez-vous? lui demande le jeune homme.
    - Tout ce que vous désirez, répond l'ange avec courtoisie.
    Alors le jeune homme se met à énumérer:
     "dans ce cas, j'aimerais bien la fin des guerres dans le monde,
     plus de justice pour les exploités,
     tolérance et générosité envers les étrangers,
     davantage d'amour dans les familles,
     du travail pour tous le chômeurs, et... et..."
L'ange lui coupe alors la parole:
     "Excusez-moi, Monsieur, vous m'avez mal compris.
     Ici, nous ne vendons pas de fruits, nous ne vendons que les graines".
Ce petit conte, que j’ai mis sur ma carte de vœux, a du succès. Je l’ai lu au début de mon homélie le jour de l’Épiphanie. Je ne sais pas si le reste de mon homélie a passé, mais ce beau texte, oui et j’en ai eu des échos. D’ailleurs mon ami René B. le citera dans son discours de remise de la Légion d’honneur à Mado A.

2- « Les vivants ferment les yeux des morts. Mais ce sont les morts qui ouvrent les yeux des vivants ». (Cité par M-Christine Barrault)

3- « La vie, c’est un peu de temps pour apprendre à aimer » (Abbé Pierre)

4- J’entre en retraite. Je m’aperçois que pour un prêtre, quand on se présente, par exemple, c’est difficile de prononcer ce mot. Pour la plupart des chrétiens, et même pour les autres, un prêtre ne peut pas « prendre sa retraite ». J’ai envie de dire : « Vous ne disposez plus de moi ! Je deviens bénévole ». Serais-je moins prêtre en étant bénévole ? L’être n’est-il pas plus important que le faire ?

5- « Sois bon et miséricordieux avec toi-même
Accepte-toi tel que tu es, avec tes limites et tes ombres.
Considère tes échecs comme autant de chances.
Lâche tes rêves de perfection,
Réconcilie-toi avec ton passé
Renonce à tes culpabilités,
N’aie pas peur de faire des erreurs,
Détache-toi du regard d’autrui et des fausses images de réussite » .(Anselme Grün – La vie 24.10.01)

6- « Croire peut être intelligent », disait Rahner. « Croire rend intelligent » dit Urs Von Balthazar.

7- « On demande encore au rabbin si le concept de miracle existe dans le talmud, la Torah. Sa réponse est un trait d’esprit : ‘La traversée de la mer rouge est un miracle, la manne tombée du ciel est un miracle, les guerres gagnées dans le désert sont des miracles. Mais les miracles accomplis par Dieu sont les plus faciles. Dans le Talmud, c’est à l’homme de faire des miracles : comment s’entendre avec son voisin, avec son patron, avec sa femme et c’est autrement plus ardu’

8- « En passant de la religion de la croix à celle du bien-être, les chrétiens occidentaux ne se retrouvent-ils pas à prêcher qu’un Dieu sans colère a conduit des humains sans péché dans un Royaume sans jugement par le ministère d’un Christ sans croix » ? (J-L Souletie, La crise, une chance pour la foi – Atelier – p. 100)

9- « Ce type, il n’a plus assez de musique dans le cœur pour faire danser sa vie ». (Céline – film Marius et Jeannette) Je sens que cela pourrait m’arriver !

10- « Par la mer passait ton chemin, ton sentier par les eaux profondes et nul n’en connaît la trace » (Ps. 76.20)

11- « Vous n’avez pas à connaître tous les temps et les moments que le Père a fixéx de sa propre autorité, mais vous allez recevoir une puissance, celle du Saint-Esprit qui viendra sur vous » (Actes 1.7-8). Père, pardonne-moi : dans notre monde où tout est planifié, dans lequel nous voulons toujours mieux contrôler la situation, comment veux-tu que j’entende ce message ? Comment accepter de ne plus maîtriser, de me livrer aveuglément ? Toi, Seigneur, qui connais tous les cœurs, libère ma tête de toutes ces choses qui l’encombrent pour je laisse place à l’Esprit. « Comme un souffle fragile, ta Parole se donne, comme un vase d’argile, ton Amour nous façonne.. » (Témoignage 473 p. 7)

12- « Une Eglise qui n’est pas attentive aux questions des hommes, à leurs préoccupations existentielles et qui ramène tout de suite à de grands principes, ne peut se faire entendre, même et surtout si ses réponses sont justes ». (Albert Rouet)

13- « S’arrêter, se taire,
ne plus bouger, ne plus penser,
ne plus diriger, ne plus s’inquiéter,
ne plus se soucier, tout déposer, juste se reposer,
se laisser aimer, se laisser faire, se laisser revivifier,
s’unir, s’offrir ».
                       (Louis-Marie Boivineau « Venez, adorons-le » Parole et silence)



14- L’Eglise, une grosse fatigue ? (Emission Ripostes avec S. Moatti)

Morandais : L’Eglise est en bien meilleur état qu’on ne le dit…craquante, comme le printemps, énormément de capacités de séduction…

D.H-Léger – Le sol se dérobe… ‘Le fait religieux reste le plus grand fait social avec le foot !’ (R. Rémond)

M. Cool : incohérente, entre appel à la liberté et repli sur elle-même.

DHLéger : problèmes considérables d’adaptation…Modeste, pauvre, respectable… mais prisonnière d’une certaine image. Dérision…

Trésor : l’évangile, source extraordinaire de bonheur.

Une société rassasiée… ‘Tu baises pas ? t’es un con’ !

Il y a une forme de bonheur qui est l’engagement.

Aucune institution ne peut prétendre au monopole du sens…

Ne pas répondre en termes de norme à une question de sens…

Le goût de l’espérance : contribution à un monde plus juste…

16- Lire la Bible pour découvrir l’infinie complexité des rapports entre Dieu et l’homme dans la trame changeante de l’histoire..

17-
« Je vais t’aider, mon Dieu, à ne pas t’éteindre en moi, mais je ne puis rien garantir d’avance. Une chose cependant m’apparaît de plus en plus claire : ce n’est pas toi qui peux nous aider, mais nous qui pouvons t’aider – et ce faisant nous nous aidons nous-mêmes. Oui, mon Dieu, tu sembles assez peu capable de modifier une situation finalement indissociable de cette vie (le nazisme). Je ne t’en demande pas compte, c’est à toi au contraire de nous appeler à rendre des comptes un jour. Il m’apparaît de plus en plus clairement, à chaque pulsation de mon cœur, que tu ne peux pas nous aider mais que c’est à nous de t’aider et de défendre jusqu’au bout la demeure qui t’abrite en nous.. » (Etty Hillesum – Les Essentiels 14.08.01)

18- Cette paix, ce n’est pas seulement une petite vie tranquille, sans histoire, sans conflits, ce n’est pas seulement une trêve de la violence ou de la guerre. Cette paix que Jésus nous confie comme mission, elle est plénitude d’être, elle est accomplissement de soi, dans une harmonie au plus profond de son être, dans une harmonie avec les autres, avec Dieu… Combien sont des empêcheurs de vivre parce qu’ils n’arrêtent pas de se lamenter devant leurs limites ou leurs faiblesses ? Etre artisan de paix, c’est d’abord accueillir et cultiver cette paix au plus profond de soi, c’est accueillir avec humour la situation qui est la mienne, c’est encore apprendre à aimer et à savourer la vie qui est la mienne ! (RP)

19- Que suis-je en train de devenir ? Chef ou serviteur, autoritaire ou éducateur ? Grand manitout ou tout à tous ? paroissial ou missionnaire ? Militant ou méditant ? Concurrent ou frère ? Gestionnaire ou apôtre ? Frondeur ou libre ?

20- En préparant un mariage :

Stéphanie : s’il y avait un Dieu…

Paul : Quand tu auras un enfant, pourras-tu lui épargner toute souffrance ? Tu l’aimeras beaucoup, et c’est énorme. Je crois que c’est ce que fait Dieu…

Stéphanie : Vous, les pratiquants, les prêtres, j’ai remarqué que vous ne voyez pas Dieu comme nous, comme ma grand-mère…

Paul : C’est Jésus qui m’a appris à voir Dieu comme un Père…

Stéphanie : Si j’avais pas fait ma communion sauvage, j’aurais peut-être appris cela…

Paul : J’ai remarqué qu’il n’y a pas beaucoup de traces profondes qui restent avant la confirmation.

Stéphanie : Je n’avais peut-être pas le droit de communier. Ma grand-mère a jugé que je pouvais.

Paul : Ne t’inquiète pas, ta grand-mère a agi avec son bon sens de croyante. Et puis, Jésus a dit : « Prenez en mangez-en tous ! » Ce n’est pas réservé à quelques-uns. Mais tu as peut-être encore à découvrir le sens de ce geste auquel les chrétiens donnent beaucoup de prix.

21- Cahin-caha, sur ma route, je t’ai vu, Seigneur Jésus, et tu m’as parlé. Comme les disciples d’Emmaüs, j’ai connu pas mal de déceptions, de découragements, mes yeux ont souvent été empêchés de te reconnaître, mais je sais que tu as tours été mon compagnon fidèle, tu m’as gardé de pas mal de faux pas ou d’impasses, tu m’as aidé à ne pas absolutiser mes espoirs trop humains, tu as ouvert mon cœur lent à croire à l’intelligence des Écritures, tu m’as souvent donné le cœur tout brûlant de l’expérience de ta présence mystérieuse, tu es demeuré avec moi bien des soirs et tu m’as souvent rompu le pain de la Parole et de l’Eucharistie. Oui, je sais, je crois que tu es ressuscité, que tu es le Christ. Mais je t’en prie encore : Reste avec nous quand le soir tombe, partage-nous ton pain, donne-nous ta paix, ta joie. Donne-moi, oubliant le chemin parcouru, de continuer la route, tout tendu en avant, tâchant de te saisir comme j’ai été saisi par toi. (Retraite d’équipe à Chaillé-les-Marais)

22- « Plutôt que de nous disculper ou de nous culpabiliser, conjuguer le besoin d’être sauvé et l’assurance d’être aimé »

23- Lettre à un couple de fiancés au bord de la rupture : « Je passe cette semaine en retraite. Je médite et je prie. Je pense à vous, à toi et à N., à votre amour : n’était-il pas vrai ? À vos fiançailles si longuement et soigneusement préparées. Et à votre rupture, si inattendue, si subite. Tu as réfléchi et prié sans doute, ton éloignement t’a donné du recul. Peut-être fallait-il cela pour que tu te décides librement. Mais que ce lien tissé avec patience, mûri dans la réflexion, la prière, se défasse en si peu de temps, j’avoue que j’ai peine à comprendre. Oui, je prie, comme tu me le demandes, pour que chacun de vous trouve son chemin et réalise sa vocation. Et tu sais que je vous garde à tous les deux mon estime et mon amitié. Paul

24- Je te cherche, Seigneur, j’attends ta Parole, je désire te connaître. Permets que je te connaisse, fais que s’ouvre à moi ta vérité. (Ps 118)

25- « La communauté chrétienne est un ensemble de personnes qui, chaque jour, se pardonnent mutuellement, parce qu’elles sont des êtres faibles et qu’elles savent pouvoir compter sur la compréhension d’autres devant leurs faiblesses. Ce n’est pas une communauté de parfaits, mais c’est une communauté de personnes qui apprennent jour après jour à pardonner de tout cœur aux autres grâce au pardon reçu de Dieu »

26- Le terrain sur lequel j’arrive ne m’est pas tout à fait inconnu : il y a 20 ans, de 1978 à 1983, comme coordonnateur de la Mission Ouvrière, j’habitais Saint Sébastien et j’étais aumônier de Secteur ACO et aussi d’ACE. J’ai la tentation de faire le tour des militants avec qui j’avais de forts liens d’amitié, mais je comprends que ce serait un piège : où m’arrêter, et à quoi bon se raconter le passé. Mieux vaut saisir les occasions de revoir les uns et les autres, dans la dynamique d’aujourd’hui.

27- « Remodelage » - Journée de lancement d’année pastorale. Je suis chargé de la prière. L’Évangile du jour nous dit :’Personne ne déchire un morceau à un vêtement neuf pour le coudre sur un vieux vêtement… À vin nouveau, outres neuves’ (Luc 5.33-39) Comment ce texte résonne en nous aujourd’hui ? :
Cet appel à la liberté à cause du Christ, sans forcément suivre la tradition des anciens …
Cet appel à ne pas faire du rafistolage, mais du neuf…
Nous ne sommes pas appelés à entrer dans une période d’austérité, mais de créativité.
Nous ne sommes pas en deuil de la chrétienté.
Notre temps, notre société laïque et sécularisée, ne peuvent-ils pas être une chance pour l’évangile ?
Comment à la fois apprécier le vieux et oser le neuf ?
À quel renouvellement, quel remodelage, sommes-nous appelés ?

28- "Oh ! Tu nous as faits pour toi, Seigneur et notre cœur est las jusqu’à son délassement en toi"  (Augustin - Traduction F. Boyer)

29- Le Notre Père n’emploie pas le mot péché, mais le mot offense qui vise l’atteinte portée à une relation de respect et d’amour. (Cal Martini)

30- « Je t’aime, autrement dit, je me réjouis que tu sois ce que tu es et je ferai tout pour que tu le deviennes davantage » (Maurice Bellet)

31- Jacques me propose d’accompagner le Collectif « Présence Chrétienne au Clos Toreau » : Même si ce Collectif est tout jeune et tout petit, n’est-ce pas dans la ligne de ma ‘vocation’ en Mission Ouvrière ? Je ne vois pas bien encore comment le vivre. Me contenter de participer aux réunions ne peut suffire. Je vais commencer à prendre quelques contacts sur le terrain avec les personnes qui portent ce souci : Lucienne, Jeanne, Marie-Claire, Anne, Chantal, Annick. Elisabeth m’a dit : ‘Il faudrait que tu viennes aux petits-déjeuners du 1° mercredi’.

Quoi que je fasse, il me faut veiller à servir et favoriser la responsabilité des sœurs et le lien avec la paroisse. Mais ce n’est quand même pas rien d’être ainsi appelé à donner le signe de l’amour de Dieu et de l’Eglise dans ce quartier déshérité.

32- « De la crèche à la croix, notre Dieu se présente sous le visage de la faiblesse extrême : c’est fou de représenter Dieu ainsi... »

33- « Dieu n’est pas dans l’évènement lui-même, il est aux côtés de l’homme qui l’affronte. Il est du côté de la liberté. Il est le Dieu en quête de l’homme, de son amour et de sa foi, que le rejoint dans sa détresse comme dans sa joie. »

34- « le cœur de Dieu a voulu battre dans un cœur d’homme pour lui imprimer son rythme ».

35- Toi, l’enfant de Bethléem, au milieu de nos étonnements, tu prends corps…
Corps de promesse, corps de tendresse, corps où chante la présence de l’Autre !
Toi, l’enfant de Bethléem, au milieu de nos déchirements, tu es corps
Corps de solitude, corps de fragilité, corps où se dit notre humanité !
Toi, l’enfant de Bethléem, au milieu de nos rencontres, tu deviens corps
Corps de liberté, corps de pardon,
Corps où s’annoncent les retrouvailles !
Toi, l’enfant de Bethléem, qui fais fleurir la terre,
Apprends-nous comment on devient corps !
                                                                    Francine Carillo – Traces Vives p. 145

36- L’homme est le chemin de l’Église et le Christ est le chemin de l’homme. (J-P II – Rédemptor hominis)

37- « Nous ne pouvons pas penser l’annonce de l’Evangile sur le seul mode du don, de l’apport, de la proposition à des hommes et des femmes qui auraient tout à recevoir, mais rien à dire ou rien à donner. Nous savons bien qu’il n’existe pas d’évangélisation sans dialogue. Nous ne pouvons pas apporter toutes les réponses avant d’avoir écouté les questions. Nous ne pouvons pas écouter seulement les questions pour lesquelles nous avons des réponses. Le dialogue à vivre est ailleurs, au-delà du rapport entre les questions et les réponses. Il tient à ce qu’un même Esprit est à l’œuvre chez l’évangélisateur et l’évangélisé, et que le premier, s’il sait ce qu’il propose, accepte aussi d’être converti par celui qui a bien voulu l’écouter ». (Louis-Marie Billé – Ouverture Assemblée plénière 2000)

38- « L’Église est le Corps du Christ et nous sommes membres de ce Corps. Mais notre initiative, notre responsabilité, notre fonction, sont elles aussi considérables. Nous y sommes providentiellement irremplaçables. Une seule cellule peut infecter tout l’organisme ; une seule cellule peut laisser passer l’aiguille qui le sauve. L’Église, il faut s’acharner à la rendre aimable. Il faudrait s’acharner à éviter tout ce qui en elle, sans nécessité, rend son amour indéchiffrable. Il y a mensonge par omission à ne pas témoigner que notre joie d’enfant de Dieu, c’est d’elle, la Mère, que nous la tenons. Il y a une reconnaissance de famille pour elle qui doit transparaître dans nos vies. L’Église, il faut s’acharner à la rendre aimante. Son amour est en grande partie à notre merci. « C’est dans les âmes que l’Église est belle » dit St Ambroise. Dans nos vies, l’Église doit être bonne ; dans nos vies, le Christ doit aimer à l’aise, dans le sens même de son amour, dans les règles de son amour, dans les exigences de son amour. Plus le monde où l’on va est sans Église, plus il faut être l’Église. C’est en elle qu’est la mission. Il faut qu’elle passe à travers nous ». (Madeleine Delbrêl – Nous autres, gens des rues)

39- Bien pauvre tu resteras tant que tu n’auras pas découvert
que ce n’est pas les yeux ouverts que tu vois le mieux !
Bien naïf tu resteras tant que tu n’auras pas appris
que, les lèvres closes, il est des silences plus riches que la profusion des mots !
Bien maladroit tu resteras tant que tu n’auras pas compris
que, les mains jointes, tu peux bien plus agir qu’en agitant les mains !
                                                                                                         Dom Helder Camara

2003 – Perles, sel, graines et grains de sable


1- Dominique : « Comment se fait-il que la foi se soit effondrée en quelques années ? » (15.02.03)

2- « L’équilibre de la vie, c’est comme un château de cartes : chaque espèce qui disparaît fragilise l’ensemble. Les espèces sont solidaires les unes des autres » (Emission TV sur Darwin et l’évolution, 22.02.03) J’ai fait le rapprochement avec la foi et l’Eglise : chaque témoin ou expression de foi qui disparaît fragilise l’ensemble… Où donc est le roc ?

3- « Chaque fois que nous célébrons un sacrement, c’est l’E-St qui agit dans notre monde. L’ordination est un sacrement. Aujourd’hui, grâce au Oui de ce jeune, à l’action priante de notre assemblée et à mon ministère d’évêque, nous allons une nouvelle fois permettre à l’E-St d’agir dans notre monde ». (E. Lecrosnier)

4- Mickael et Stéphanie : Je leur dis : « Vous n’avez pas envie de dire Merci ? Merci qui ? R/ Le Destin ! (avec un petit sourire en coin). Et Stéphanie ajoute : « Ma foi, c’est ‘Aide-toi, le ciel t’aidera’ ! » Je lui réponds : le ciel, c’est qui ? (22.02.03)

5- Ghislaine : « La foi, c’est faire des choses improbables, au-delà du raisonnable » (Sa copine, vieille militante communiste qui, entendant parler des visiteurs de prisons lui dit : « ça m’intéresse ») (23.02.03)

6- « Songez qu’un grain de blé peut vous donner 35 épis. A raison de 50 grains par épi, vous avez au minimum 1500 grains ». (Pierre Rabhi – Prier 249 p 9)  Cf 16 mars 97 – Année B

7- Visite chez Cédric et Bernadette. Cédric, que j’ai baptisé à 20 ans, me raconte comment chaque soir ils font la prière avec Marie (4 mois) : Je vous salue, Marie, Notre Père… Et elle se trémousse, elle attend cela, elle est tout heureuse. (Le problème, c’est qu’on voudrait bien qu’elle s’endorme aussitôt, mais elle voudrait qu’on reste avec elle) (22.02.03)

8- Valérie, tout à fait étrangère à l’Eglise, prépare son mariage. Elle en parle à sa collègue de travail, Emilie et, stupéfaite, elle découvre qu’Emilie, un belle fille de 20 ans, très moderne, très gaie, qui fume… est aussi une chrétienne pratiquante…

9- Myriam, que j’ai baptisée à 20 ans il y a 3 ou 4 ans, aurait voulu à la fois être mariée et religieuse. Elle vient de me dire qu’elle a quitté son copain, Yves et qu’elle a passé chez les sœurs de la Visitation 4 jours de retraite où elle vivait avec la communauté et qu’elle y a trouvé une grande joie…Que sera son avenir ? Elle est toujours en formation chez les gendarmes !

10- « Je voudrais empêcher que les choses aillent de soi, tant il est vrai qu’aujourd’hui l’athéisme va de soi. C’est la superstition dominante. » (Eric-Emmanuel Schmitt)

11- Aujourd’hui, l’accent n’est mis que sur l’amour que Dieu a pour nous. Dieu nous aime, Dieu vous aime, vous êtes aimés ! rabâche-t-on dans la plupart des sermons, comme s’il ne s’agissait que de rassurer ou de se rassurer au lieu de mieux comprendre, mieux définir ce que peut signifier pour nous aimer Dieu. Nous risquons d’entretenir une sorte d’immaturité humaine, de foi infantile, de miséricorde qui finira par ne plus avoir aucun prix à nos yeux puisqu’elle ne nous demande rien. .. Il faudra bien nous affranchir de ces revendications affectives. Je préfère l’image d’un Dieu qui se tient au-devant de moi et qui attend que je le rejoigne, qui me le demande, en m’encourageant à chaque pas, si hésitant soit-il… Et si l’amour que Dieu a pour nous, en définitive n’était que d’éveiller en nous ce désir de lui…qui seul peut nous grandir et élargir nos horizons. Ce serait la marque de son emprise sur notre vie. (Philippe Mac Léod – Essentiels 2997 p14)

12- De minoritaires à minus… il n’y a pas loin aux yeux de certains. C’est pourtant un grand « plus » que nous avons reçu ! Fais, Seigneur, que nous soyons heureux et fiers d’être sel de la terre et lumière du monde.

13- « Chacune de nos communautés a vocation d’être l’image du désir de Dieu pour le monde : - nous ouvrir au désir de Dieu pour le monde, - nous portons cette plénitude dans nos limites, - nous ne pouvons pas renoncer à cette plénitude à cause de nos limites ». (P. Soubrier – Réco 06.03.03)

14- « Le regard chrétien n’enferme pas dans la faute, n’handicape pas l’autre, ne retenant que ce qui ne va pas… Telle personne qui ne m’aime pas depuis des années, ‘cet espèce d’enfouaré’, il est aimé de Dieu. J’en ai connu des regards qui handicapent… Quand j’étais athée, j’étais très violent. Quand tu deviens chrétien, ça imprègne toute ta vie quotidienne, ça travaille. Le chrétien, c’est quelqu’un qui a déjà modelé sa pensée, il ne tombe pas dans le manichéisme » (Dominique – ACO 07.03.03)

15- « Jacqueline, tu es aimée de Dieu, là, comme tu es ! » C’a été un grand jour. Etre aimée de Dieu, c’était impensable pour moi. La plus merveilleuse nouvelle qu’on puisse entendre. Ca demande toute une démarche, un cheminement. L’ACO m’a fait grandir dans la foi. Quand l’occasion se présente, je suis à l’aise pour dire ma foi, pour dire que Dieu est amour. (Jacqueline – Eq. Ainés 26.02.03)

16- Soirée animée par 30 jeunes de la JOC à Beautour le 8.03.03 en vue de Bercy. Ils ont eu le culot de commencer par lire l’évangile des talents, jusqu’au bout, avec un tout petit commentaire : « Seigneur, c’est vrai qu’il nous arrive de rester renfermer sur nous-mêmes… » Et puis ils ont fait preuve de talents étonnants et variés pour danser, chanter, jouer, avec beaucoup d’humour et de simplicité.

17- J’ai rencontré récemment Lucien B. qui traite les brûlures et autres dartres, zona, avec une pierre et en faisant des prières. Il se rappelle que je lui avais dit : « Si c’est pour le bien… » Et désormais, sa pierre s’appelle Paul !

18- Ce vendredi 14 mars, à la fin de la messe de St Jacques où nous avons bien partagé, Fabienne D. dit, avec son sourire angélique et en mettant sa main sur son ventre : ‘Je vous annonce une grande joie…Esteban va avoir un petit frère ou une petite sœur’

19- « Michel-Ange disait que Dieu avait donné une sœur au souvenir et qu’il l’avait appelée l’espérance. Ce qui éclaire l’existence, c’est l’espérance » (J. d’Ormesson – C’était bien p. 244)

20- « L’homme n’est jamais si grand que quand il se met à genoux pour servir ses frères » c’est l’une des premières phrases du spectacle sur Jésus passionné de Dieu, passionné des hommes.

21- Même s’il n’a aucun pouvoir, même s’il n’a pas d’importance, chacun de nous peut changer le monde (Vaclav Havel)

22- Croire, c’est laisser Dieu venir à nous, c’est nous laisser inviter, regarder, aimer. C’est consentir à manquer, à ouvrir un espace, une relation. (Foi d’un Peuple 137 p. 24)

23- Je reconnais que quelqu’un est passé par le creuset de l’amour divin non pas à la façon dont il me parle des choses du ciel, mais à la façon dont il me parle des choses de la terre. (Simone Weil)

24- Il faut que les prêtres soient liés à un peuple d’une façon ou d’une autre, même lorsqu’ils ont ont une tâche pastorale un peu à distance. Qu’ils prennent le temps d’écouter et de respecter la complexité de la vie. (R. Jorens – Croire 153 p 29)

25- « J’ai parfois l’impression que les chrétiens dorment sur un trésor, celui de leur propre tradition, et qu’ils ne savent plus l’exprimer, le communiquer… De même les chrétiens sont impressionnés par leur sentiment d’isolement… du coup ils ont parfois tendance à ne plus oser se dire chrétiens, ou à oublier qu’ils le sont, alors que ce sont eux qui possèdent ce trésor. » (J-C Guillebaud – Prier 251 p 20)

26- « L’Eglise, lisant l’évangile ne peut que témoigner du fait que l’appel du Christ est un appel à un changement de vie radical, à un engagement, à un choix. Dans la lignée de l’Alliance et des prophètes, il s’agit de choisir la vie, de s’engager sur le chemin qui mène à la vie… Le baptême est bien un plongeon et non une visite guidée autour de la piscine… Si l’Eglise ne répercutait pas, dans sa pratique, cet appel radical, serait-elle encore l’Eglise ? Elle ne peut pas se contenter de se présenter comme un vague réseau, plus ou moins virtuel, de personnes liées entre elles par quelques centres d’intérêt communs. » (J. Joncheray – Appartenances partielles à l’Eglise) – Croire n° 154 p. 13)

27- Rencontre Michel et Josiane G. à la manif du 13 mai. Josiane me dit qu’à leur 1° rencontre d’ACO à Couëron, elle a dit qu’ils n’allaient plus à la messe. Ceux qui y vont encore leur ont dit : « Si vous saviez comme on s’ennuie à la messe ». Elle en conclut qu’il y a mieux à faire que d’aller à la messe. Je lui dis : ‘Il y a une autre solution, c’est de rendre la messe intéressante’ !

28- Sortie de messe à St Jacques le 18.05. M. V. me parle des jeunes à qui il fait la catéchèse à Blanche de Castille. Découragement. Il faut tout reprendre à la base avec les enfants… Toute une génération qui n’a plus aucun attrait pour la foi. Discussion serrée sur ceux qui ont faim et soif et ceux qui n’ont aucun goût, sur l’absence des jeunes à la messe, etc..Je me surprends à lui dire : ‘La chrétienté a souvent été une entreprise de domination’. Ca le fait bondir !

29- ‘Le ciel nous tombe sur la tête’ me dit Denise L. alors que je prends le risque de l’aborder dans la rue en dépit de nos brouilles anciennes. Elle m’explique ce qui vient d’arriver à Georges qui s’est réveillé hémiplégique la semaine dernière. Et si j’osais aller voir Georges en rééducation à St Jacques, puisque je sais qu’il aime avir des visites pour parler…

30- « Demande beaucoup à l’homme, exige peu de Dieu » (Proverbe arabe)

31- En rentrant d’une soirée ‘Pastorale en milieu populaire’, Marinette, tout en conduisant, évoque (p-e à partir de la manière dont M-Jo G. a raconté sa lecture des noces de Cana avec des femmes de milieu très populaire) la retraite de 30 jours qu’elle a faite avec cinq autres personnes, où elle devait chaque jour résumer en 3’ le fruit de ses méditations de la journée. Un jour, elle rencontre le père animateur et lui dit qu’elle a l’impression de rouler à contresens sur une autoroute. Puis elle me parle de la dernière rencontre du petit comité Mission Ouvrière du Secteur où elle a entendu Solène, responsable JOC dire son impossibilité de participer à la messe à SFB (et même son désaccord avec les accompagnateurs qui parlent à la place des jeunes), le peu d’importance que Bernard B. responsable ACO et M-O semble accorder à la messe, alors qu’il est porteur d’un grand dynamisme appelant et qu’il fait toute sa place à la parole de Dieu. Q/ Où vont-ils puiser leur souffle ? Moi, je sais que l’Eucharistie a une place essentielle dans ma vie de croyante.

32- En rencontre des aînés de l’ACO, Albert B. exprime un certain trouble : il se sent incapable de lire et de comprendre l’évangile tout seul. Il n’en apprécie que plus l’homélie de la messe qui aide à comprendre et à actualiser. Mais est-il normal, après avoir vécu en Eglise depuis si longtemps, de dépendre à ce point des prêtres ? Dans nos rencontres syndicales inter-CFDT, ce n’est pas facile non plus de prendre la parole. On attend qu’un autre commence, on commence par écouter ceux qui savent parler, et puis, après, on se risque. Dans notre équipe d’ACO, quand quelqu’un risque une parole de foi, ça donne souvent la parole à d’autres. L’ACO du Secteur envisage de faire une formation « Inviter l’Evangile en Révision de vie », c’est à dire « inviter J-C ». Monique C. croit avoir la solution : « Prions en Eglise ». Mais d’autres disent :’Est-ce que je fais la bonne interprétation de ce que j’écoute ?’. La parole de Dieu est un peu comme une langue étrangère, de l’hébreu parfois. Pour la rendre vivante, il faut rentrer dans la rencontre et le dialogue, soit en prenant du temps dans la prière, soit en échangeant avec d’autres…Comment donner la parole au Christ dans ma vie ?

33- L’équipe réagit sur les homélies : Elle doit nous aider à comprendre l’Ecriture, mais il ne faut pas qu’elle soit qu’une explication de texte… Elle doit aussi être une expression de foi… Si elle ne nous remet pas en cause, c’est qu’elle plane !

34- « Zoom sur la vie » ! C’est l’invitation de l’ACE cette année. ‘Zoomer, c’est regarder en grand ce qui est petit’

35- « S’avancer chrétien » : c’est la belle trouvaille de M-Christine dans son brouillon de projet pastoral. Elle écrit : ‘Dans notre monde, il faut beaucoup d’audace pour s’avancer chrétien… Prendre conscience que nous ne pouvons plus ignorer les non-chrétiens ou les regarder avec suspicion ou crainte. Nous devons travailler à vivre en quelque sorte avec eux et non simplement à côté d’eux. Prendre conscience que chacun de nous est porteur d’un message d’humanité et que nos différences, loin de constituer toujours n sujet de désaccord, de conflit, peuvent au contraire nous enrichir.’

36- Michèle est venue me voir pour parler de sa liaison avec Rémi. Je ne voulais pas être juge, ni moraliste. Je crois qu’elle a pu s’exprimer en toute confiance. Elle vit plutôt cela comme une grâce, tout en mesurant ce que cette situation a de précaire. Elle met au-dessus de tout le respect de la vocation de Rémi et se dit prête à renoncer à cette liaison. Mais si tout à coup le fait devenait public, comment pourraient-ils le maîtriser ? En attendant, c’est compliqué et inconfortable d’être obligés de se cacher. Sa prière, c’est de s’en remettre à Dieu en toute confiance.

37- Hier soir, à l’invitation de France-Palestine solidarité, j’ai été voir « Checkpoint » (‘Le voyage immobile’) au Bretagne. Pièce jouée par 5 Palestiniens pour raconter leur vie et leur lutte. Pas très facile à suivre, en Arabe… mais c’est un beau témoignage. Et je rencontre là plein de gens que je n’ai pas vus depuis des décennies : Jeanine Garnier, Claude Tellier, Marie-Anne Cariou, Il y a aussi Josèphe, Anne G., Michèle Cornudet, Monique Choblet et son groupe. La cause palestinienne mobilise…

38- Question essentielle : quel feu, au fond, brûle en nous, dont les lueurs devraient illuminer notre regard ? Il n’est pas utile de multiplier les rencontres, les manifestations, ni de partir à la recherche de nouveaux adhérents. Il est urgent de creuser ce qui fait que nous sommes chrétiens, d’être tout entiers ce que nous proclamons, de faire de notre souffle une prière incarnée pour tous les hommes qui nous rencontrent. Le reste suivra – coulera de source.. (Les Essentiels 3016 p. XV)

39- Fête de la musique. La grande foule, jeune, bruyante, à peine joyeuse… J’ai aperçu notre évêque dans la rue St Pierre : tout seul , tout gris. S’approchait-il de la fête ? Il venait d’ordonner 4 prêtres et 3 diacres. Ces jeunes sont-ils du même monde ? J’ai rencontré Francis R., bras dans le plâtre. Il se rendait à St Nicolas où les jeunes du Secteur doivent présenter quelque chose (à défaut de la place Ste Croix occupée par des groupes rock). J’ai marché longtemps cherchant l’image de Dieu dans cette immense foule et ne la trouvant guère : quelques chorales, groupes Jazz, flûte… Et je suis tombé sur un groupe avec un public nombreux. Je me suis approché : c’était les jeunes chrétiens, chantant joyeusement, dirigés par un jeune prêtre encarté, invitant la foule à battre des mains, ce que bien peu faisaient. Un tapis rouge reliait ces gradins à l’entrée latérale de St Nicolas, ouverte, surmontée de la banderole : « Jouons, Chantons et Fêtons Dieu ». A l’intérieur, quelques personnes, plutôt en repos qu’en adoration, devant une icône bien fleurie et de nombreuses votives. Une jeune femme s’est approchée de l’orgue où un homme jouait et s’est mise à chanter en soliste quelque chose de beau. Est-ce cela l’Evangile sur la place publique ? Pourquoi pas ! Mais quoi encore ?

40- Sur l’une des briques de la fête ACE de la Joliverie, je lis ceci : « L’ACE m’apprend à partager, à aider les enfants qui sont dans la rue, à lutter contre la guerre. On fait tout ça en s’amusant »

41- Michel est venu m’accompagner à la Fac de lettres pour assister Julie Gaudin qui présente son Mémoire de maîtrise d’histoire sur notre témoignage au retour d’Algérie. J’en suis d’autant plus heureux que Marcel et Henri n’ont pas pu être là. Au retour, dans la voiture,  Il me parle de sa vie, de sa prière (le chapelet, Magnificat), de la prière du cœur qu’on a trop négligée. Il me dit qu’on n’a pas encore touché le fond de l’effondrement de la foi, mais qu’il est émerveillé par ce qu’il voit poindre dans les communautés nouvelles : il est abonné à la publication des Béatitudes… Tout cela ne nous empêche pas d’apprécier la compagnie de M-L, d’admirer son jardin et de goûter le repas tout simple qu’elle nous a préparé. C’est quand même étonnant cette confiance profonde qui s’établit entre nous après 50 ans de séparation et malgré nos regards tout différents sur la vie…

42- Je tombe sur cette vieille image d’ordination de Maurice JANNAULT ordonne prêtre le 22.12.51. Sous une image du St Paul de la Cathédrale de Reims, cette prière de Bernanos : « Vous nous avez jetés dans l’épaisseur comme un levain. L’univers que le péché vous a ôté, nous le reprendrons, pouce par pouce, nous vous le rendrons ». Avons-nous été vraiment dans l’épaisseur ? Avons-nous été levain ? Qu’avons-nous repris ? Qu’avons-nous à rendre ?

43- Mon dentiste, M. Khimake, est d’origine marocaine et musulman. Il m’a confié qu’il était soufie. La dernière fois, il m’a dit que le Ramadan lui procurait une sensation de bien-être, de plénitude. Aujourd’hui, il me demande s’il peut me poser une question : « Il m’arrive d’avoir des visions, qu’en pensez-vous ? » Je lui dis que le mot vision a plusieurs interprétations. Chez les mystiques chrétiens, il me semble qu’il s’agit d’expérience de lumière, de joie, d’illumination. Je lui explique que je ne suis pas un mystique, pas un grand priant, peut-être même pas un spirituel, mais un pasteur, qui à la faveur de la retraite devient un peu plus méditant et même priant. Je lui explique comment je prie, et la joie, la paix que cela me procure souvent. Je me doute que la période du Ramadan doit être marquée par de telles expériences. Par contre, nous chrétiens sommes un peu méfiants devant certaines visions… de la Ste Vierge. Je lui dis que je suis heureux d’avoir cette occasion de parler avec un musulman et que je souhaite que l’Islam trouve une expression plus intériorisée dans la société française. La laïcité, même si elle a été d’abord une épreuve, a été une grande chance pour le christianisme de se défaire de ses tentations de pouvoir. Peut-être l’Islam a-t-il lui aussi beaucoup à gagner à vivre dans cette société laïque de respect de l’autre. Personnellement, je n’aime pas porter de signe extérieur de ma foi, mais je n’aime pas trop pour autant qu’on veuille totalement la reléguer dans la sphère privée. Le christianisme, comme l’Islam, est aussi un fait social, qui a besoin de vie de communauté et de manifestations publiques. Il me demande si je peux partager ma foi. Je lui dis que je suis très heureux quand l’occasion se présente pour moi de le faire, comme quand la maman de ma voisine est morte. J’ai même pensé parfois que j’aimerais qu’on puisse se réunir avec des gens de mon immeuble pour lire la bible ensemble. Mais c’est du rêve, car je me méfie du prosélytisme. Je lui explique la différence entre « prêtre en retraite » et « ancien prêtre » : il me dit, « Quoi qu’il arrive, ça vous marque si profondément que vous serez toujours prêtre ». Je ne sais plus comment cet échange s’est terminé et s’il aura une suite. Mais on s’est quittés en se serrant chaleureusement les deux mains…

44- « Une seule fois le Christ s’est endormi, pour qu’une épouse fût tirée de son côté. Il s’est endormi sur la croix » (St Augustin)

45- Au cours du réveillon, Yves et Colette me disent qu’ils s’y sont très bien retrouvés dans le message de Noël du Père Soubrier. Je ne m’en souviens même plus ! Je le recherche dans OF du 26.12 : ‘Noël pour tous ! Ce n’est ni une revendication, ni un slogan ni un programme. Ce n’est pas non plus une formule conformiste ou minimaliste. C’est le message que des bergers ont reçu voilà plus de 2000 ans en Palestine. Pour tous ? C’est avec raison que nous nous méfions des intentions tellement générales et des discours tellement universalistes qu’ils ne rejoignent personne alors qu’ils prétendent concerner tout le monde. Celui qui est né dans une crèche, mort sur une croix, s’est mis à la portée de tous en sa faisant proche de chacun. .. Ainsi le Christ a pu dire : ‘Je suis venu pour que tous aient la vie et qu’ils l’aient en abondance’. Non pas seulement quelques-uns triés sur le volet, sans défauts et sans problèmes, mais tous. Personne n’est trop loin, rien n’est fini, rien n’est définitivement perdu. Le Christ est venu chercher et sauver ce qui était perdu. Pour lui, chaque personne a un nom unique et une mission d’espérance pour le monde… Noël n’est pas une vague rumeur religieuse accompagnant un sursaut de fraternité et de recherche de la paix. C’est un visage : pour nous, chrétiens, le seul visage que nous puissions regarder sans cesser de voir tous les autres. » C’est vrai que c’est très bien. Yves et Colette qui ne vont plus guère à l’église, comme tant d’autres, restent pourtant de vrais chrétiens, comme tant d’autres.

46- "J’appelle œuvre d’art celle qui me fend, qui me traverse, pour que j’accepte d’aller au mystère qui m’habite" (Albert Rouet)

47- Le 26.12, Gérard Sévérin, Michel Renaudineau et moi nous sommes retrouvés au restaurant au "bistro" à Ancenis. Au moins 50 ans depuis nos dernières rencontres communes. Rencontre désirée, redoutée… Depuis 50 ans, pour l’essentiel, nous sommes restés fidèles à nous-mêmes. Michel croit ne pas avoir réussi sa vie, mais il est sans doute le plus spirituel, le plus artiste. Gérard, toujours psy, est manifestement habité d’un grand désir de Dieu et se plait à faire de la théologie dans sa paroisse orthodoxe. J’ai offert à Michel les Psaumes de la Bible Bayard et à Gérard « Dieu pour penser le sens » de Gesché. Ca m’étonnerait qu’il n’y ait pas de suite…




2004- « Perles, graines, sel et grains de sable.. »

1-       La période des vœux prend pour moi une tonalité particulière avec mon ‘petit carton’ envoyé à beaucoup
d’amis. Pas loin d’une centaine cette année ! Ca traduit mon désir et mon besoin de rester en lien, peut-être ma peur de la solitude ? En tous cas j’étais particulièrement content et fier d’avoir réussi à encadrer ce beau poème dans une photo de mes vacances dans les gorges de la Jonte. Et j’ai eu beaucoup de ‘retours’, des gens touchés personnellement (M-Annick, Chantal), d’autres qui m’ont demandé s’ils pouvaient l’utiliser pour eux-mêmes, d’autres qui l’ont pris comme support de rencontres de CMR ou de MCR.
Aimez-vous, Aimez-moi.
si vous m'aimez, laissez moi m'échapper.
si vous aimez vos proches, laissez-les s'écarter.
si vous aimez vos petits, laisses-les s'élever.
si vous aimez vos grands, laissez-les s'envoler.
si vous aimez vos défunts, laissez-les s'en aller, 
Aimez-vous !
l'éloignement n'empêche pas la proximité.
l'absence ne supprime pas la présence.
Aimez-vous et ma joie viendra vous caresser.
et cette joie, je vous le dis, 
personne ne pourra vous l'ôter ! 
 2-   J’ai accueilli à déjeuner Claude et Monique, René et Hélène : les évènements qui nous ont liés, vieux de 35 ans, sont sous-jacents, mais je m’aperçois que tout cela est gravé profondément et que nous communions dans une grande fraternité et des discussions où l’évangile affleure.
3-       Invité à dîner chez Robert et Claudine dont j’ai célébré le mariage il y a 22 ans. Aurélie (21 ans), Delphine (17) et Sarah (14) sont là, manifestement ‘mobilisées’ pour accueillir chaleureusement l’ami prêtre. Toutes 3, dans le sillage de leur père, sont très investies dans la gym (à la Cambronnaise), très spontanées et saines dans leurs réactions… sur le racisme (voile islamique), sur la pauvreté, sur la famille, sur le célibat des prêtres (incompréhensible pour Aurélie). Ai-je été un bon témoin de la joie et de l’intérêt de croire ? En tous cas j’ai beaucoup apprécié leur sens des valeurs, leur chaleur humaine.

4-       En réponse à mon petit poème de vœux, Nicole me répond : « Ma vie est remplie et heureuse dans l’échange avec les amis. Car, au fond, je n’ai qu’un talent, celui d’aimer (mais pas l’amour comme vous les chrétiens le concevez). Etre là auprès de ceux que la vie me fait rencontrer, sans chercher à leur apporter ni à leur retirer. Etre vivante en même temps qu’eux, c’est tout… » Elle ajoute : « Quand reverrai-je l’ami qui m’a trahie en croyant que je mentais ? J’ai du mal à m’en guérir… » Et elle me joint ce superbe poème de Paul Eluard :

« Mais soudain de parler je me sens conquérant

Et plus clair et plus vif et plus fier et meilleur
et plus près du soleil et plus sûr de durer 
Un enfant naît en moi qui n'est pas d'aujourd'hui

                                       Un enfant de toujours par un baiser unique
Plus insouciant qu’un premier papillon

A l’aube le printemps lui donne une seconde

Et la mort est vaincue un enfant sort des ruines
Derrière lui les ruines et la nuit s'effacent
                                                                (Paul Eluard, grandeur d’hier et d’aujourd’hui)
5-       Michel R à qui j’ai offert les Psaumes de la Bible Bayard m’écrit : ‘Tu ne peux imaginer combien ce livre me plaît : mise en pages, sobriété, lumière, etc… Moi qui ai eu en mains de beaux livres, je suis comblé.. Il faut dire qu’il nous emmène loin… et même au-delà’

6-        L’Abbé Pierre, fêtant les 50 ans de l’insurrection de la bonté de 1954, ose dire :’Malheur à nous les gens heureux qui ne veulent point faire de mal aux autres, mais qui savent faire comprendre à leurs élus que soit servi d’abord leur plaisir de vivre avant que soient donnés aux autres les moyens de vivre. Malheur à nous les gens heureux qui veulent avant tout préserver leur niveau de vie et leur cadre de vie. Le plus grand nombre, qui ne manque pas du nécessaire, ignore la situation des pauvres. Comment servir politiquement les faibles ? Malheur aux municipalités qui refusent de construire des logements sociaux. Malheur à notre démocratie si la majorité des électeurs ne voit pas que vivre dans la rue, c’est mourir peu à peu. Ce n’est pas à nos gouvernements de nous dire comment être solidaires, c’est à nous de leur montrer la société que nous voulons. Ils comprendront’.

7-       Je suis allé à la rencontre des ‘Ateliers de l’APSECC’. Surprise d’y rencontre Christophe P. Je luis dis : ‘Voilà une conversion à la quelle j’ai du contribuer !’ En fait il me dira que c’est plutôt Bernard B. Il ajoute : ‘Les prêtres de ma génération croient qu’annoncer l’évangile n’a rien à voir avec la sécurité sociale’

8-       Magali, 27 ans, sans domicile, sans famille, sans travail, sans espoir…sans avenir ? Sa maman (pays basque) lui propose de fréquenter un noir pour se lancer dans l’import/export, elle craint son éducateur qui pourrait trop parler au juge, la nounou de Tony-Dylan (2ans) ne lui raconte rien de concret de la vie de son fils, son copain Mickaël, qui la loge dans sa chambre du FJT, prend du shit. En qui peut-elle avoir confiance ? Carène, la marraine de TD ? Hélène, celle qui s’occupe d’elle je ne sais plus à quel titre… Elle a été à l’étape, en foyer, entre centre de soin au château de Clermont. Sa seule adresse officielle est le Foyer de l’Enfance où elle rencontre son fils une fois par semaine. Elle ne sait même pas comment fêter son anniversaire, car d’autres l’ont fait avant elle avec plus de moyens qu’elle. Elle est toujours fauchée . On lui propose un stage de formation (surtout pas comme femme de ménage) mais elle n’y croit pas.

A qui, à quoi peut-elle croire ? Elle voudrais que je lui apprenne une prière qui marche.. Je viens de passer 1h1/2 avec elle. Elle parle sans détour, loyalement, me disant au passage : ‘Je voudrais partir très loin… Je ne sais pas comment m’habiller…J’ai l’impression que tout le monde me regarde… J’ai 27 ans, je ne suis rien…’  Ai-je eu raison de lui proposer de venir parler ? Il faut que je fasse en sorte qu’elle ne s’attache pas trop à moi…… Elle me rappelle vendredi : Mickaël, qui rentre en clinique, vient de la mettre à la porte parce qu’elle ne fait rien. Elle est à la rue ; J’essaye de chercher avec elle les points d’appui qui lui restent : Carène, Hélène. On parle longuement, elle ne voudrait pas que je coupe, mais je n’ai pas de solution. Je lui dis que je la rappellerai lundi…. Lundi : je trouve au bout du fil une Magali regonflée ; M. hospitalisé lui a réouvert sa porte. Elle a beaucoup réfléchi. Elle est déterminée, dans les 8 mois, à trouver un logement, du boulot, pour pouvoir reprendre TD avec elle. Elle puise sa force dans la mémoire de son grand-père…

9-       ‘Notre exercice ici-bas, ce doit être la louange de Dieu, car notre bonheur dans l’éternité ce sera la louange de Dieu. Nul ne peut devenir propre à cet avenir s’il ne s’y exerce dès maintenant’. (St Augustin – Commentaire Ps 148)

10-   Invité chez M. et P, je me demande quoi emporter : une bonne bouteille ? J’hésite, j’ai une petite boite de chocolat. En prenant l’apéro, je raconte mon hésitation, comme si elle n’avait plus de raison d’être… Et peu à peu, surtout en l’absence de Michel, je découvre qu’il continue à boire et à fumer en cachette (avec la complicité de P et M-A). Ils ont envisagé de vendre, de s’en aller, sinon de se séparer. Mais l’amour demeure malgré tout. Ils se donnent le change en partant le plus souvent possible, dans des résidences DCN (grâce à Frédéric) ou chez des amis, en Alsace, à Toulouse… J’ai promis de les inviter chez moi.

11-   « Choisir la vie malgré tout »  (Deut 30.19) Cette Parole qui me parle depuis que je relis le Deutéronome avec Jean-Marie Carrière, est aussi le thème de la conférence que doit donner Litta Basset à la Manu ce 22 Février et à la quelle j’ai été invité par Siloë. Une intuition : si j’appelais M-A qui m’a écrit ‘J’accepte ton souhait de retrouver pour moi la joie profonde, mais comment ?’ Elle s’apprêtait à m’appeler ! On se donne rendez-vous pour le soir. Le témoignage de LB va effectivement rejoindre parfaitement son expérience… et son désir de renouer le dialogue avec ‘le grand potier’ à qui elle s’était adressé à la sépulture de B. et qu’elle a laissé de côté depuis. Elle me demande si je veux bien l’accompagner dans cette reprise de souffle…

12-   Marie-Laure et Serge n’avaient pas reçu ma carte de vacances postée pour qu’elle arrive le jour de l’opération de Serge. Il me décrit en détail son cancer, son opération, et sa « rémission » . Il a regardé dans le dictionnaire, le sens religieux et le sens médical. Lui, le « mécréant » (il préfère ce mot à non-croyant et il a raison, car ce dans quoi il a baigné continue à l’imprégner), il assume le passé, le présent et l’avenir avec beaucoup de réalisme et d’humanité et Marie-Laure avec beaucoup de lucidité. Leur petit Serge, 10 ans, m’a aussi beaucoup surpris : ce n’est plus le bébé ni le petit trublion que j’avais connu. Marie-Laure sait bien qu’il faut toujours avoir compter avec le temps.

13-   Maryse, si menue, si fragile, réduite à l’impuissance et au silence depuis 8 mois, vient de mourir à 48 ans. L’église St Jean était trop petite pour accueillir tous ceux qui sont venus pour l’accompagner. D’où vient un tel rayonnement ? D’une vie courageuse et toute donnée…

14-   Je n’avais pas revu Serge, mon filleul de 35 ans, depuis 15 ans au moins… Il a connu des galères.. Avec Virginie, ils ont donné le jour à Marie qui a 3 ans… et que je vais peut-être baptiser bientôt. René et Hélène m’emmènent dans leur chambre pour me montrer qu’ils ont un Christ, posé sur la Bible que je leur avais offerte au baptême de Serge. Sylvie (séparée du papa de Morgan) attend un autre bébé et va se marier religieusement avec Stéphane, gendarme, d’une famille ‘de droite’, mais droit…

15-   Le péché, c’est ce qui nous rend réticent par rapport à la foi et médiocres dans l’application à notre existence de ce que nous croyons dans la foi’.  (G. Martelet – Croire 170 p. 24) ‘Est péché ce qui en nous fait obstacle à la grâce, est péché ce qui en nous retarde les autres sur le chemin de Dieu’ (Marie Rouanet – Prier 259 p. 9)

16-   Soirée ‘Porteurs de signes : affirmer aujourd’hui une identité religieuse’ . Monique R. instit en grande section raconte comment elle s’ingénie à ne jamais révéler son appartenance chrétienne, ni à ses collègues (très hostiles), ni aux enfants qui eux parlent au passage de Jésus, de Jéhovah, du Ramadan, ni à la jeune stagiaire indienne avec qui elle a eu des liens profonds qui se continuent par correspondance. Je lui dis : ‘Tu ne crois pas que ton accent te trahit ?’ Elle ne le croit pas… Elle s’étonne même que ses propres enfants demandent à aller au caté, à faire leur confirmation… A près coup elle me dit qu’elle regrette n’avoir pas dit dans le groupe qu’elle est en ACO.

17-   « Etre chrétien, c’est être dans l’action » : C’est Dominique qui ne jure que par Radio-Fidélité, la Bible, la prière… qui a écrit cela en convocation pour la révision de vie d’ACO. Je n’en reviens pas de tout ce qu’il vient de vivre comme action dans sa petite entreprise d’imprimerie. C’est admirable d’intelligence, de justesse, de courage. Et il dit clairement : ‘C’est grâce à l’ACO !’  Et, grâce à lui, tout le partage tourne autour de l’action. Je n’avais pas vu cela depuis longtemps. Comble du paradoxe, il nous donne comme texte Ro, 4,1 : « Si quelqu’un, sans rien accomplir, a foi en ce Dieu qui rend juste l’homme coupable, Dieu estime qu’une telle foi fait de lui un juste ». Ca suscite un beau débat !

18-   Journée de récollection avec notre évêque : ‘A la source de nos fidélités… éprouvées, ressourcées, converties’. Quelles sont les fidélités qui nous dynamisent ? Celles qui ont marqué notre vie ? Quelles sont les infidélités qui nous éprouvent ?  Fidélité proposée, offerte, ancrée en Dieu. Bien plus que le ‘tout-puissant’, son nom est le Dieu-fidèle, à la fois le rocher et la source. Nous réjouir de ce que Dieu a commencé en nous, de ce que nous devons achever avec lui. La première fidélité du prêtre, c’est de croire à son propre mystère. La communion entre prêtres n’est pas seulement un moyen pour tenir, elle est expression de la fidélité, ressourcement de la fidélité, pas seulement pour tenir, mais parce que nous sommes tenus par Dieu. Fais nous trouver notre joie dans notre fidélité. « Il dépend de nous que l’espérance ne mente pas dans le monde ». (Péguy). Cf Madeleine Delbrel.

19-   Ce matin, je voulais aller à la sépulture de Mimie Pernès. En téléphonant pour savoir l’heure, j’apprends que le rendez-vous n’est pas à l’église St Léger d’Orvault, mais à la salle St Léger pour une cérémonie laïque. Nous sommes très nombreux, la salle est archi-pleine, un ami anime, présente les témoignages (dont une évocation du parcours de Mimie qui fait bonne place à sa militance à la JOC et à l’ACO), les chants (Le temps des cerises, Que serais-je sans toi ? C’est beau la vie). On lit le poème d’une des petites filles, on écoute l’inévitable texte : ‘La mort n’est rien’… La chorale de la Bugalière chante ‘Quand les hommes vivront d’amour’. Beaucoup s’y associent. C’est émouvant, recueilli, presque priant. Beaucoup de chrétiens et d’anciens chrétiens sont là. Je suis heureux d’y être aussi, avec un autre prêtre. Est-ce que cette manière de faire ne va pas faire école ? Je repense au film que je suis allé voir hier après-midi : Les invasions barbares. Il n’y a pas de doute, on change d’époque et on tire son chapeau devant tout manière humaine de vivre et de mourir.

20-   Veillée de prière avec le groupe ‘Présence chrétienne au Clos Toreau’ hier soir, chez les sœurs. Nous étions une vingtaine. En communion avec le Christ souffrant, nous avons partagé ce qui nous fait mal, ce qui est dur à vivre, le combat que nous essayons de mener contre le mal. La plupart se sont exprimés, ont écrit sur un petit papier, et même formulé leur prière au Christ. Jamais encore le groupe n’avait été aussi loin dans l’expression de foi et de prière. Je crois que cela donne plus pleinement sens à la présence d’une communauté religieuse au cœur de la cité.

21-   Jo m’a demandé de témoigner ‘Comment l’Eucharistie est un trésor pour moi’  au cours de la célébration de la Cène. J’ai d’abord pris cela comme un signe de la confiance qu’il me fait. Je n’avais pas réalisé qu’il y aurait autant d’enfants et c’est plutôt aux adultes que je me suis adressé. Quelques-uns m’ont dit merci.

22-   Dimanche dernier, j’ai demandé à Pierre et Simone qui déjeunaient chez moi s’ils avaient regardé l’émission d’Arte sur les origines du Christianisme. Ils m’ont dit : ‘Non, on a regardé l’émission de TF1 sur les enfants de prêtres !’ Beaucoup ont du faire comme eux !

23-   Un couple a demandé à me rencontrer pour célébrer le pardon. A travers eux, qui sont à CVX, je pressens qu’il y a des manières très riches de vivre la foi (et même la direction spirituelle par une femme..), mais que l’engagement fort dans l’Eglise n’empêche pas de chuter gravement et que la célébration communautaire ne peut pas avoir la même pertinence. N. m’a demandé quelle différence il y a entre guérison et salut. Est-ce qu’il y a vraiment salut si on n’est pas guéri ? Mais n’y a-t-il pas illusion à croire qu’on peut retrouver l’innocence ? Je me suis appuyée sur l’évangile de la brebis perdue.

24-   Marie-Jo est de nouveau hospitalisée en psychiatrie. Je suis allé la voir trois fois. Il faut que je continue : le coup de fil de Christine m’y appelle, mais que c’est difficile de communiquer. Et puis l’état de ce service me révolte. Mais il n’est sans doute pas concevable que les malades aient leur chambre individuelle, leur téléphone… Au minimum un parloir digne de ce nom ! Mes petites allusions à l’aumônerie n’ont aucun écho…

25-   A la fin de la rencontre de l’équipe ACO (aînés), tour de table :C’est quoi la résurrection pour toi ? pour nous ?

-          un symbole, notre vie a un sens

-          on pratique une religion pour que le monde soit meilleur

-          la communion parfaite avec Dieu

-          la sève qui irrigue ce grand arbre qu’est l’humanité

-          une autre vie en Dieu

-          je suis aimé de Dieu

-          l’âme qui vivra

-          j’y crois : le Christ est digne de foi

-          dans la vie, on n’a pas d’autre chose à faire que de chercher à transformer le monde

-          l’amour parfait (qui n’existe pas ici bas)

26-   J’ai fait mal à Sébastien en me moquant un peu du spectacle « Mariah » donné à la cité des Congrès. Il vient me demander des explications sur mes (nos) réactions souvent agressives vis à vis de l’Emmanuel. Il me dit s’être « converti » grâce à l’Emmanuel et avoir eu le projet d’y entrer. Ce que j’ignorais. Je lui donne 3 explications.. ŒNos craintes quand le P Marcus a ordonné un premier prêtre pour l’Emmanuel dans le diocèse en lui promettant de lui confier une mission : décision sans concertation et crainte que s’introduise ainsi un corps étranger difficile à assimiler dans le diocèse. A la nomination de l’équipe de La Madeleine, ma lecture de la biographie de Pierre Goursat, fondateur de l’Emmanuel, et en particulier de la p. 170 où je vois l’accusation d’avoir désertifié l’Eglise…ŽMa conviction que pour proposer l’évangile dans la société actuelle, il faut vivre avec les hommes un vrai compagnonnage et non s’enfermer dans sa bulle ou croire qu’on revitalise l’Eglise d’abord par la remise en valeur du rituel. D’où une longue discussion sur la joie (ou la tristesse) des célébrations, sur le port de la croix ou du col romain, sur l’engagement des chrétiens dans la cité…Echange difficile, mais je suis quand même content qu’on ait pu parler… (J’apprendrai le lendemain qu’aux yeux d’un René Martin, par ex. le spectacle « Maria » est du show-biz qui n’a aucune valeur (même si la musique est belle).

27-   En entrant dans le grand amphi de la fac de Droit pour écouter Leila Shahid, la TV m’a interviewé : ‘Pourquoi venez-vous de signer la pétition contre le mur ? Pourquoi venez-vous ici ce soir ?’ J’ai répondu de mon mieux. Leila Shahid est une bonne avocate de la cause palestinienne, elle aime son peuple, mais elle est aussi une femme de paix, qui ne tombe pas dans l’antisémitisme, même quand elle est sans concession devant les abus de puissance d’Israël. «Oslo : il y a place sur cette terre pour deux peuples… Pourquoi n’arrive-t-on pas à trouver le chemin de la mise en œuvre du droit ? Où trouver un autre endroit où la victime préconise une solution viable pour elle-même et pour son ennemi ? Seul Israël n’est pas soumis au contrôle de l’armement nucléaire : cela met le peuple israélien en danger…. Nous avions senti l’odeur d’une vie libre. Il n’y a rien de plus fort que le sens de la dignité et le refus de l’humiliation. L’apprentissage de la coexistence et du vivre ensemble est l’enjeu le plus profond de ce conflit, y compris pour l’Europe..’

28-   1° Mai, « Festy Joc », à la Fleuriaye. Même si les effectifs diminuent, et donc les grands moyens de mettre en œuvre la parole du mouvement et la célébration, le contenu reste fort et j’ai trouvé la célébration très belle, d’autant que notre évêque joue le jeu avec naturel et talent.

J’ai eu la joie de parler avec Jérôme C., qui espère est sur une bonne pente ; de me trouver à côté de Jean-Luc F. qui m’a raconté comment il remonte peu à peu la pente… Et moi, je m’aperçois qu’on m’aborde aussi comme un malade… Ce n’est pas faux, mais je n’aime pas ça ! J’ai vu aussi tout un groupe de jeunes du voyage rentrer à la suite de Christophe pendant la célébration… Chapeau

29-   « Usque ad mortem » : ces mots qu’Edouard m’a dit lorsque je sortais de sa chambre à l’hôpital de Vertou, je ne les ai compris qu’une fois la porte fermée. En lui disant au revoir, je lui disais : ‘On n’a même pas parlé de ta santé’… Il a bredouillé une réponse qui se terminait ainsi. J’y vois le signe qu’il s’apprête à vivre sereinement le grand passage. J’ai retrouvé d’où vient cette formule : Phil. 2.8

30-   Je viens de passer 1 h ½ avec Magali et Mickaël (voir n° 7). Je me demande s’ils ne vont pas réussir à former un couple. Mais que de difficultés ! Mickaël ne peut accepter que Magali prenne le dessus sur lui, car ‘elle n’est qu’une femme’ ! Je réagis vivement. On décortique leurs rapports mutuels, c’est comme une épreuve de force où aucun ne veut se laisser dominer par l’autre. Magali confie qu’elle demande parfois pardon, mais pas directement. Finalement Mickaël aussi mais il met toute sa fierté de mâle à n’en rien laisser paraître. Je suis émerveillé de la confiance qu’ils me font. Je leur dis que c’est tout ce que je peux faire pour eux, les écouter en profondeur, les bousculer, les aider à grandir dans l’amour, à désirer d’abord le bien de l’autre. Ils savent bien que tout cela ne peut se concrétiser que s’ils ont du boulot (Mickaël va se présenter lundi pour être éboueur – Magali est en formation depuis 15 jours, elle pense qu’elle pourrait s’orienter vers le nettoyage industriel, car toutes les mères célibataires cherchent dans le social où c’est bouché). Il leur faut aussi un appartement HLM, car au Foyer ce n’est pas vivable. C’est manifestement Magali qui se bouge pour chercher. Et puis il y aura la question de Tony-Dylan : pour le prendre chez eux, il faut qu’ils arrivent à ne plus menacer l’autre de rupture dès la première anicroche. Et il faudrait que Mickaël apprenne à sourire. Je leur dis que peut-être un jour je célébrerai leur mariage… Ca les fait rêver ! Mais il faut qu’ils apprennent à se prendre en charge. Je découvre que Michaël a évoqué l’hiver prochain : je leur dis que ça me paraît prématuré pour vraiment s’engager l’un vis à vis de l’autre.

31-   Carole, de l’équipe ACO, m’appelle pour me demander ce que je pense de Vitoz ( ?). Je lui dis que je ne connais pas, mais que je ne suis pas du tout porté vers ces techniques psychologiques. Elle a fait un stage l’été dernier dans ces eaux-là. C’est vrai qu’elle aurait plus de penchants naturels vers cette spiritualité que vers l’ACO ! Mais tant qu’elle se sent bien en équipe…

32-   Le fruit de la foi est l’amour ; Le fruit de l’amour est le service. Le fruit du service est la paix. (Mère Térésa)

33-   Au commencement, Dieu créa l’homme à son image, homme et femme il les créa.’ C’est le texte que Régis et Sabrina ont choisi pour leur mariage. C’est beau, un couple qui s’aime… Ce matin, la radio ne parle que du mariage des homosexuels. Je n’ai pu m’empêcher de leur dire que je ne me verrais pas vivre une telle démarche avec un couple d’hommes ou un couple de femmes !… Régis est d’accord avec moi, Sabrina trouve qu’il n’y a pas de raison…

34-   Au petit déjeuner du Clos Toreau, Yasmina (éducatrice de rue, avec qui j’ai un peu discuté) interpelle Khadija et Nadia : « Ce n’est pas correct de parler entre vous en arabe quand vous êtes parmi des français ». Elles sont un peu gênées. Je me permets de dire que je suis heureux de me trouver parmi des arabes et même d’entendre leur langue, mais que moi je ne connais qu’une langue, alors qu’elles en connaissent deux. « Quand vous vous mettez à parler arabe, on ne peut plus communiquer, c’est dommage ».

35-   Au pied de l’ascenseur, M. Brasseur est en conversation avec Mme ? . Je les salue chaleureusement ; Lui me dit : « J’attends le jour J ! » Ca se voit à sa mine qu’il n’ira pas loin. On lui dit quand même que la vie est plus forte qu’on ne pense. Il nous dit  qu’il a essayé de se passer de morphine, mais que ce n’est pas possible et qu’il aimerait s’endormir et ne pas se réveiller. Arrive Simone D.  J’en profite pour m’éclipser. Sait-il que je suis prêtre ?  (Je viens de le revoir, 3 mois plus tard, tout essoufflé, dans le hall. Il me dit : « Il n’y a rien à faire ; on vit au jour le jour … 6 mois ? 1 an ? …Et puis on passe de l’autre côté ! On va voir comment c’est ! » Je n’ai pas su lui dire du tac au tac : ‘Je suis convaincu que c’est infiniment plus beau que tout ce qu’on peut imaginer !’)

36-   Roger et Denise D. dont j’ai célébré le mariage le 11 Avril 1964 viennent me voir. Je les avais complètement perdus de vue, alors que j’avais eu des liens assez personnels avec eux. J’en suis un peu humilié, mais nous avons plaisir à évoquer plein de souvenir de Basse-Indre, de la Chabossière, des Forges, du catéchuménat, de la JOC. Je suis émerveillé de leur amitié et de la confiance entre nous. Ils ont quand même un peu de mal à suivre l’évolution et ça n’est pas étonnant.

37-   A la fin de l’assemblée de secteur ACO, Jo B. vient me trouver… Il me parle du chemin de Compostelle de MJ, mais c’est pour me dire qu’il a marché une semaine avec son fils Simon (20 ans) dans l’Aubrac et me confier son désir de silence, son « appel du désert ». Comment ne pas mettre ce désir profond en lien avec le fait qu’il a été prêtre et que c’est inscrit au plus profond de lui ?

38-   Visite de Jacky C. à la permanence de St Jacques. Il vient apporter son offrande pour l’église : « On lui demande tout, on lui donne rien ! C’est comme le syndicat, on veut tous les avantages sans payer sa cotisation… Les musulmans ont de l’argent pour construire des mosquées et nous on ne donne rien pour faire vivre l’Église. Je mettais des fois de l’argent à la chapelle dans le tronc des cierges. Mais une sommes comme ça (100 €), je ne peux pas la mettre là-bas… On a perdu les valeurs. Je suis pour que les étrangers aient le droit de vote, mais il faut qu’ils acceptent d’avoir aussi des devoirs ».

39-   Alain R. séminariste Mauricien n’est pas appelé par son évêque à l’institution. Nous en sommes étonnés, peinés. Clément écrit au supérieur du séminaire et lui demande s’il n’y a besoin que de prêtres cadres… Samedi midi, nous avons écouté Alain se demander si l’appel n’était pas élitiste : ils veulent des prêtres capables de répondre à tous les besoins. Malgré sa surprise et sa déception, il positive et se raccroche au fait qu’on l’encourage à poursuivre une vocation religieuse.. il se sentirait proche du Prado (qui n’existe pas encore à l’île Maurice).

40-   « L’Esprit-Saint suscite en ce moment des renouveaux profonds qui dessinent déjà l’avenir de l’Eglise catholique en France » (Mgr Dagens)   L’Esprit Saint ne nous manipule pas, il nous sollicite, il nous appelle…

41-   ‘Mais vous, mon cher Lama, que pensez-vous du Christ ? « Je crois, répondit-il, que le Christ et Bouddha sont deux frères. Seulement le Christ est plus lumineux et plus large que le Bouddha. Si tous les hommes étaient de purs bouddhistes, ils dormiraient en paix ; mais si tous les hommes étaient de purs chrétiens, ils ne dormiraient point du tout, ils veilleraient perpétuellement dans une joie ineffable et alors la terre serait le ciel » (Extrait de ‘Mes missions en Sibérie’ – Cité dans Les Essentiels n° 3078 – 26.08.04 – p. 43)

42-   « Ce n’est qu’en la vivant lui-même, en la mettant en œuvre ici et aujourd’hui, que le témoin de la foi, quel qu’il soit et quelque méthode qu’il adopte, pourra prétendre en faire reconnaître la crédibilité, dans l’état présent de la société et de la culture » (J. Doré – La grâce de croire p. 227)

43-   En lisant dans ‘Que choisir’ une enquête sur le pain et toutes les manières de faire du pain de médiocre qualité, je me rappelle cette parole que m’a dite un moine de Belle-Fontaine : « Vous, les prêtres de paroisse, vous êtes les boulangers de la parole de Dieu… » Et je me demande si souvent nous ne fabriquons pas un pain de la Parole de peu de saveur, lourd à digérer, parfois sorti du congélateur ?

44-   Pour la 1° fois, je viens de participer, avec Roger et Catherine, à la préparation d’une sépulture conduite par un laïc. Roger en l’occurrence, dont j’ai admiré la manière pleine d’humanité et de foi de dialoguer avec le mari, les sœurs et belles-sœurs de Bernadette, 40 ans, handicapée en fauteuil, décédée subitement alors que depuis 3 ans elle avait enfin trouvé le bonheur avec son mari Didier. Après leur départ, j’ai dit à Roger : ‘Tu as bien fait les choses’. Il m’a répondu qu’il ne cherchait pas à savoir si c’était bien ou pas. Il fait ce qu’il y a à faire, tout simplement. Belle leçon !

45-   J’ai dû me battre avec Marguerite et menacer d’appeler la police pour la mettre à la porte de chez moi. Chaque année elle vient passer 15 jours chez sa fille Françoise et en profite pour me relancer. Je l’ai accueillie il y a une huitaine de jours. On bavarde de tout  et de rien, mais elle poursuit son idée qu’elle m’aime depuis longtemps, que c’est plus fort qu’elle, que ça ne lui est jamais arrivé, qu’il n’y a pas de mal à ça, que tout le monde le fait. Elle m’a même montré un article relatant le graves faits de pédophilie du séminaire d’Autriche, avec à l’appui la photo du cardinal je ne sais plus comment… « Les curés feraient mieux de coucher avec des femmes plutôt que d’arriver à cela’.  J’ai cru qu’à force de temps et de patience cela allait lui passer. Là, elle a dépassé les bornes, elle a voulu forcer ma porte, en y mettant y énergie que je n’aurais pas imaginée. Quand j’ai fini par lâcher, elle s’est accrochée à moi, on s’est battu, elle est même tombée, pendant que je partais téléphoner, mais c’était peut-être calculé… Et puis elle a eu peur et s’est sauvée… Elle a essayé de me relancer par téléphone, mais j’ai été catégorique : ‘Je ne veux plus entendre parler de vous’.  J’espère qu’elle ne continuera pas à m’importuner en m’appelant assez souvent au téléphone depuis Majorque. (26.12.04 : j’ai trouvé un message sur mon répondeur en rentrant de la messe de Noël. Je n’y répondrai pas).

46-   « L’amour est plus originel que le péché… » Jean-Noël Bezançon

47-   ‘Tout se passe comme si nous vivions « en-dessous de nous mêmes, de l’incroyable potentiel divin et humain qu’il y a en nous » (Bertrand Vergely) C’est en redécouvrant ce trésor intérieur que nous pourrons laisser éclore dans nos vies ces vertus capables de changer le monde : force, humilité, harmonie dans nos relations, fécondité créatrice, discernement… Ces dons que demandait dans sa prière le sage roi Salomon ( I Rois, 3.4-14) (Edito de Prier – Juin 2004)

48-   Il faut parfois longtemps pour appeler la peur par son nom. On nous a trop dit qu’il n’y avait pas lieu d’avoir peur. Du coup, quand nous en sommes la proie sans pouvoir la nommer, c’est nous qui ne savons plus où nous mettre comme ces premiers humains dont la Genèse nous raconte l’histoire. Le sentiment de peur est tellement constitutif de l’exister humain que c’est la première émotion à apparaître dans la bible. « Ta voix, je l’ai entendue dans le jardin. J’ai eu peur car je suis nu et je me suis caché ». (Lytta Basset – Moi, je ne juge personne p. 126) L’aventure du jardin d’Eden raconte notre condition humaine : nous sommes fondamentalement démunis, à nu devant autrui vivant. Si la peur liée à cette nudité est en définitive la peur d’être à nouveau blessé, si par ailleurs la fuite dans l’esprit de jugement conduit à une impasse, on comprend que les premiers humains redoutent le face à face avec Dieu. (LB p. 130) L’expérience de l’épouvante…, de la grande peur… jette une lumière crue sur une réalité que notre adhésion affairée au monde nous permet d’ordinaire d’ignorer : l’Etre est d’abord un sable mouvant dans l’expérience humaine. Peut-être avions-nous cru que l’Etre était solide, que cela allait de soi de pouvoir compter sur lui, au point que nous n’y avions jamais pensé. Mais lorsque la déchirure apparaît et que nous ne savons plus à quoi nous raccrocher, nous comprenions bien pourquoi nous ne voulons rien savoir de la fragilité de l’être. L’expérience est redoutable, mais on peut la prendre pour une occasion unique de commencer à bâtir sur du solide, peut-être pour la première fois de sa vie. (Lytta Basset- Moi je ne juge personne p. 139) A quoi se raccrocher dans cette « grande vidange de tout », ou, en termes plus bibliques, sur quel roc bâtir sa maison ? … Plus Jésus se laisse envahir par ce moi lumineux (« Moi je suis la lumière du monde » Jean 8.12) qui se tient au-delà de toute peur et de tout esprit de jugement, plus il y découvrait le monde, c’est à dire tous les humains en quête de la lumière de leur vie, et plus il proposait aux êtres concrets qu’il rencontrait de s’approprier cette lumière – Vie qui leur était destinée. Voir Philippiens 2.7 : Le Moi le plus conscient de la lumière – Vie qui l’habite est celui qui accepte et désire en être dépossédé au profit des autres, d’une multitude d’autres humains… (141-142)

49-   Je viens d’être élu au Conseil Presbytéral. Mon premier mouvement a été de refuser : quel discernement, quelles perspectives suis-je en mesure de faire avancer ? C’est peut-être d’abord en fonction de moi que j’ai accepté : on est honoré d’être élu par les collègue ; on se raccroche à l’idée d’être reconnu même si on doute de l’utilité. Je n’ai pourtant pas un grand souvenir des 2 ou 3 mandats que j’ai remplis dans le passé…

50-   La médicalisation de la société acceptée par tous ? L’industrie pharmaceutique est aujourd’hui le produit de cette ambiguité que nous avons tous devant la souffrance, le vieillissement, le mal-être. Il y a un paradigme de la plainte. Auparavant il fallait que la pathologie soit objectivement visible par un paramètre mesurable.. Aujourd’hui, la plainte vaut ipso facto traitement. La médecine n’a plus pour seul objectif de vous guérir, mais de vous faire vivre le mieux possible et le plus longtemps avec votre pathologie… Votre médecin et les médicaments deviennent votre tuteur. Ils lissent entièrement votre vie. Comme le rappelle Didier Sicard, président du comité national d’éthique, c’est la stratégie collective que nous avons choisie’.  In ‘Le Monde II’ novembre 04

51-   Marc Pennec, reporter à O-F, m’a contacté pour un article à partir de notre Dossier Algérie. Je fais signe à Marcel et aux deux Henri. Comme Henri D. part pour 15 jours en Iran, une première rencontre se fait avec lui chez moi et le lundi suivant M.P. revient interviewer Marcel, Henri P. et moi. Il connaît bien le dossier et commence par nous interroger sur le pourquoi de son « enfouissement » depuis 47 ans. Mais ce qu’il veut surtout comprendre, c’est pourquoi nous avons résisté à la dérive morale, violente et raciste, pendant notre rappel en Algérie. Est-ce du fait de notre éducation, de notre foi ? Nous sommes à l’aise avec lui et nous nous livrons sans réticence. Mais je ne dors guère la nuit suivante : les copains qui liront cet article (appelé à avoir une large diffusion puisqu’il paraîtra en dernière page) ne vont-ils pas penser qu’on les juge et qu’on leur fait la morale ? J’appelle MP qui me rassure… mais me promet aussi de me montrer le projet d’article avant sa parution. Ce qu’il fait par un courriel…, que je lis à Marcel par téléphone. Nous trouvons l’article très bien fait, concret, fidèle ; nous proposons quelques corrections. Il demandera encore des photos. Et le 22 Novembre paraît le fameux article, avec une excellente présentation et nos photos en première et dernière page, plus une photo de 5 des rappelés, lors d’une réco en Octobre 57 au séminaire de Kouba à Alger. Immédiatement nous sentons que ça va avoir un grand retentissement, confirmé aussitôt par diverses réactions qui nous arrivent d’un peu partout, la plupart plutôt favorables.

52-   Après les élections américaines, un pasteur évangélique progressiste, Jim Wallis, dit : Comment se fait-il qu’un mouvement qui milite pour l’égalité sociale et raciale, la couverture maladie universelle et la protection des plus démunis récolte moins de voix chez les croyants qu’un parti qui soutient la guerre, les plus riches et qui croit que Dieu est du côté des intérêts américains ? « 

53-   Je viens d’écrire à Bernadette et Cédric qui viennent de m’annoncer la naissance prochaine de leur 2° enfant : « Je ne me porte pas mieux. J’ai même parfois du mal à assurer. Mais j’essaie de garder assez de sérénité et de paix pour ne pas paniquer et pour savoir apprécier les petites joies qui me viennent presque tous les jours si je sais les reconnaître. Merci de votre amitié… »

54-   « A Noël, les anges retrouvent le moral devant les démons »  (Un enfant, entendu à la radio)















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